Irrespirable by Olivia Kiernan

Auteur:Olivia Kiernan [Kiernan, Olivia]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier-Suspense-Thriller
Éditeur: Hugo Publishing
Publié: 2018-10-17T22:00:00+00:00

CHAPITRE 16

Vicky, ma neurologue, illumine chacun de mes yeux. D’abord le gauche. Pause. Puis le droit. Pause. Elle éteint la lampe stylo et la glisse dans sa poche. Mouvements réflexes qu’elle exécute des dizaines de fois tous les jours. Elle lève l’index dans mon champ de vision. J’ajuste ma vue sur le doigt et suis le mouvement alors qu’elle le déplace devant mon visage et dessine un crucifix dans l’air. Une bénédiction médicale.

— Le bleu de Prusse. Vous en avez déjà entendu parler ?

— Le bleu de Prusse ? Hum. Je ne sais pas. Pourquoi vous me demandez ça ?

Elle me tourne le dos et prend des notes.

— Ça m’intéresse.

Elle lève le visage, les lèvres pincées.

— Ça vous intéresse ?

Elle hoche la tête et éclate de rire.

— Bon, d’accord, c’est pour une affaire. Mais ne vous inquiétez pas, votre nom n’apparaîtra pas.

Elle se lève et me demande de l’imiter. Elle lève mes bras avec le bout de ses doigts jusqu’à ce qu’ils forment un angle droit avec mon corps, dans le prolongement des épaules. Je connais ce test. Je l’ai subi à de multiples reprises. Je ferme les yeux.

Elle me tapote le dos de la main.

— Asseyez-vous, ordonne-t-elle, en continuant de prendre des notes. Et elle finit par apposer sa signature en bas de mon dossier.

— Pour moi, vous êtes en parfaite santé. Aucune trace de traumatisme ou de pathologie. Votre cicatrice évolue bien, même si je sais qu’elle vous fait toujours souffrir. Tout ce que je peux vous dire, c’est que ça va s’arranger. Le couteau a sectionné une petite terminaison nerveuse sous-cutanée et elle se régénère, ce qui peut expliquer la sensation de brûlure et de fourmillement que vous ressentez. Dans le pire des cas, vous en avez pour dix-huit mois. Sinon, tout va bien.

Je ne peux refréner un sourire. Moitié joyeux, moitié sarcastique. Ce n’est pas le physique qui me travaille.

— Merci docteur…

Eleanor Costello continue de taper à la porte de mon cerveau. Peter Costello était dans un sale état. Nous n’avons pas retrouvé de téléphone sur le cadavre, et là où il était, il ne risquait pas de m’appeler. Il était dans l’eau depuis près de deux mois. Cette longue disparition corrobore les conclusions d’Abigail. Le matin de la découverte du corps, il y avait eu une grande marée, qui avait pratiquement vidé le cours de la Liffey. Un promeneur avait repéré son crâne brun, ballotté comme une bouée couverte d’algues. Le marcheur n’y avait d’abord pas prêté attention et puis les traits fantomatiques du visage s’étaient peu à peu précisés alors que l’eau descendait. Le promeneur avait alors contacté la police. De prime abord, comme dans le cas de la mort d’Eleanor, cela ressemble à un suicide. Mais il est impossible de savoir si Peter Costello était en vie lorsqu’il a pénétré dans l’eau. La médecine légale a ses limites, mais les premiers éléments de l’autopsie révèlent des violences. On a retrouvé de longues coupures au couteau le long de ses flancs et à l’intérieur de ses cuisses.

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